Paradoxalement, les fortifications de Strasbourg restent largement méconnues. Si les périodes récentes, en particulier les années 1872 -1918, ont fait l’objet de nombre de publications, les périodes antérieures ne sont que rarement abordées si ce n’est du point de vue des archéologues.
Pourtant Strasbourg, dès le moyen-âge, compte au rang des grandes villes dont les fortifications sont déjà imposantes. Après une période de flottement, avant l’annexion française en 1681, où l’on modernise les fortifications mais sans avoir les moyens de ses ambitions, il n’appartient à nul autre que Vauban et, plus tard, à Cormontaigne que d’en faire une place forte moderne parmi les plus importantes d’Europe !
Du castrum romain aux fortifications médiévales.
Fortifications de Strasbourg entre 1228 et 1334 : troisième extension.
Le troisième agrandissement, entre 1228 et 1334 marque un cap décisif dans l’évolution de Strasbourg d’un point de vue économique, politique et architectural : il intègre des corps de métiers dont la ville dépend étroitement dont les quartiers de jardiniers, de pêcheurs, de bateliers et de bouchers (Finkwiller, quai des Bateliers, rue des Bouchers, rue d’Or)
L’enceinte crénelée est faite de briques et porte un chemin de ronde (vestiges visibles entre l’église Sainte-Madeleine et la rue du Fossé-des-Orphelins, actuellement en cours de restauration). Elle est flanquée de nombreuses tours carrées.
Ce dispositif de défense est particulièrement renforcé sur le bras de l’Ill, ouvert au trafic fluvial : c’est le système des « Ponts-Couverts » : cinq tour (seules quatre tours subsistent aujourd’hui) étaient reliées par des ponts recouverts d’une toiture en bois (disparue au 18e siècle). Ces tours abritaient les corps de garde et servaient encore de prisons.
Le dispositif, complété en 1571 par un éperon en maçonnerie abritant, au moment du besoin, des pièces d’artillerie. Enfin, pour cette période subsistent également des vestiges correspondants à la « Porte de l’Hôpital ».
Les ponts couverts.
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Ponts couverts, Hans von Altheimturm – Strasbourg (cliché Balliet J.M.) |
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Ponts couverts, Französische Turm – Strasbourg (cliché Balliet J.M.) |
Tour du diable (« bastion Saint-Maximilien »)
Porte de l’hôpital.
Quatrième extension : 1370-1390
Durant cette période très incertaine où sévissent des bandes de pillards, la ville doit s’agrandir tout en assurant la protection des nouveaux quartiers situés à l’ouest et au nord. D’intéressants vestiges ont été découverts au niveau de l’actuel conseil régional, place de la gare et boulevard Wilson
Vestiges du boulevard Wilson.
Ces vestiges ont été repérés sur près de 140 m au niveau du boulevard Wilson au début des années 2000. Des fouilles d’évaluation ont permis de positionner le mur d’escarpe, l’amorce de la porte de Saverne et les vestiges d’une petite tourelle de plan pentagonal.
Une partie de l’enceinte, aujourd’hui incluse dans un espace privé (cf. infra), a été non seulement conservé mais parfaitement mise en valeur.
Une tour pentagonale découverte place de la gare et transposée près du Kriegstor II.
La dernière extension à l’époque médiévale : 1387-1441
La dernière extension, entre 1387 à 1441, consacre la puissance de Strasbourg : dans sa volonté de conserver le monopole de la navigation entre Bâle et Mayence, la ville absorbe vers le sud-est un nouveau quartier de maraîchers et de pêcheurs, la Krutenau, tout en contrôlant le Rheingiessen, voie d’eau essentielle qui relie l’Ill au Rhin (actuelle rue de Zurich, le canal ayant été comblé en 1872).
Le doublement de la ligne de défense sud au XVè siècle ne changera pas radicalement la silhouette de Strasbourg. La ville est alors défendue par une imposante muraille crénelée, que renforcent près de 28 tours et 8 tours-portes… Hartmann Schedel en restitue parfaitement l’esprit !
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Strasbourg (Argentina) d’après Hartmann Schedel in : Schedel’sche Weltchronik, Nürnberg, 1493. |
Dr Balliet J.M.
6 août 2018