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de plus en plus réglementée, il consacre beaucoup de temps au repos et à d’autres formes d’oisiveté4.
La disposition intérieure retenue pour les casernes, à une époque où la normalisation apparaît, consiste en la juxtaposition de nombre de petites chambrées. Son architecture est plutôt faite de sobriété voire d’austérité mais aussi de clarté car son objet l’éloigne de l’ostentatoire. L’économie de moyens n’y est certainement pas étrangère dans un contexte où, déjà, la paucité financière est souvent de mise.
Le rapport de Vauban avec les casernes mérite quelques développements. Après un premier épisode où la théorie architecturale l’emporte sur le fonctionnel5, Vauban s’est attaché à normaliser les constructions dont celles des casernes. Vauban était convaincu qu’il fallait exclure les corridors et les multiples escaliers dans l’intérêt du service de paix, de la discipline, du respect de la vie intérieure des soldats et de la conservation des bâtiments. Les principes architecturaux qu’il développe sont simples : « Ses premières casernes ont pour modèle la maison civile. Elles ont pour avantage de faciliter l’isolement et l’indépendance de la compagnie. »6. À ce système de casernement correspondent des corps indépendants accolés en bâtiments simples ou doubles.
La caserne Suzzoni au XVIIIe.
C’est certainement Bélidor dans la Science de l’ingénieur7 qui, suivant les préceptes de Vauban, nous donne le plus d'informations sur les dispositions architecturales retenues. Elles s’appliquent, pour l’essentiel, à la caserne Suzzoni.
Construite dans les années 1704-17098 selon les plans de Jacques de Tarade, directeur des fortifications d’Alsace, elle forme un rectangle d’environ 175 mètres de long. Le corps du bâtiment abritant la troupe comprend un étage alors que le corps ouest, le pavillon des officiers, en comporte deux. Un pavillon oriental figurant sur un plan établi en 17099 comme devant encore être construit, ne le sera jamais. À l’instar des casernes de Neuf-Brisach, elle est placée le long des courtines et c’est encore Bélidor qui en donne l’explication : « Les Casernes se placent ordinairement prochent le
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Dallemagne p. 41 : « Ses heures sont rythmées par les sonneries, des exercices réguliers l’occupent - le pas cadencé date de 1668 - et le maniement du fusil remplace celui de la pique et du mousquet. La cour d’exercice prolonge ainsi naturellement les bâtiments de logement des soldats. À cette époque le soldat consacre sept heures au sommeil, deux au repos, une au repas et seulement quatre aux exercices. Il lui reste donc dix heures disponibles consacrées, pour l’essentiel, à l’oisiveté ou à des activités rémunératrices chez des particuliers. ».
Le plan des casernes de la citadelle de Lille a dû s'adapter à la disposition radiocentrique des bâtiments de la citadelle. Outre un manque de fonctionnalité certain, les surcoûts liés aux contraintes architecturales ont été importants.
Dallemagne p. 29
BELIDOR (Bernard Forest de) - La Science des ingénieurs dans la conduite des travaux de fortification et d'architecture civile. Paris, Chez Charles Antoine Jombert, 1729. Bernard Forest de Belidor [1694 ou 1698-1761] est connu comme un ingénieur, bien qu'il n'ait jamais eu cette qualité. Dans cet ouvrage, Belidor présente les principes architecturaux qui permettent d'établir des voûtes, de calculer l'épaisseur des murs, explique la manière de tracer les plans d'une fortification et de choisir les matériaux. En aucun cas, il ne propose un système de fortification modèle et il s'inscrit ainsi dans la lignée de Vauban.
Plan de Neuf-Brisak. BNUS
Seule caserne presque intégralement subsistante des quatre grandes casernes construites par Tarade dont
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deux étaient affectées à l’infanterie et deux à la cavalerie.
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p. 2 Balliet J.M. — La caserne Suzzoni à Neuf-Brisach